Les Emirats, champions de la coopération spatiale !
Article paru sur Latribune.fr le 26 septembre 2019
Ce 25 septembre, le premier astronaute des Émirats arabes unis devrait s’élancer vers l’ISS, la Station Spatiale Internationale. Cet événement illustre de façon exemplaire le vaste programme de coopération spatiale internationale qui est la marque emblématique des EAU.
La mission de Hazza Al Mansouri à bord du Soyouz MS-15 se déroule dans un cadre complet de coopération. Il rejoint en effet l’ISS en compagnie d’un cosmonaute russe et d’une astronaute américaine… !
Un rêve, avec beaucoup de travail
Ce vol est l’aboutissement d’un rêve d’enfant dit-il. Mais pour l’atteindre, la route fut longue. Diplômé du collège aéronautique Khalifa ben Zayed, il détient également un doctorat en technologie de l’information, a séjourné à l’université de Brighton, Angleterre, ainsi qu’à l’université technologique du Queensland à Brisbane, Australie. Une formation donc très internationale !
Jeune pilote militaire il a participé, à bord de son F-16, au prestigieux exercice Red Flag, dans le Nevada, avec les meilleurs pilotes américains et européens. Depuis plus d’un an il s’est préparé à cette mission en commençant à apprendre le russe. La coordination, dans cette langue, des 3 membres de l’équipage du Soyouz est en effet essentielle au cours des phases critiques du vol. Tous les échanges avec le sol, depuis le centre de contrôle, Korolev, proche de Moscou, se faisant naturellement en russe. Comme tout membre d’équipage, il a dû également suivre les exigeants entraînements physiques de survie, en vue de se préparer à affronter d’éventuelles conditions difficiles, dans le cas d’un retour sur terre hors de la zone d’atterrissage prévue.
Pilote et scientifique de 37 ans, père de 4 enfants, il ne sera nullement un « touriste de l’espace ».
Un scientifique dans la station
Hazza Al Mansouri sera à bord de la station un astronaute technicien, menant des expériences, et souhaitant faire partager sa passion à tous les jeunes des Émirats. Dans ce but, une de ces tâches sera de faire découvrir, au cours d’un long interview télévisé, à tous ses jeunes compatriotes, dans leur langue, les principaux modules de la station.
Sa mission scientifique sera très intense, avec 15 expériences au cours de ce séjour de 8 jours, qui lui fera faire plus de 100 fois le tour de la terre. Elles couvriront aussi bien des observations de la terre, que des expériences de physiologie spatiale, particulièrement dans le domaine de la vision.
L’objectif de cette mission est triple. Tout d’abord fournir aux Émirats arabes unis de nouvelles informations dans le secteur médical, deuxièmement, faire croitre plus vite leur économie, par l’observation terrestre, enfin, attirer le plus grand nombre de jeunes émiriens vers des formations scientifiques et techniques. Ce dernier point est même un élément essentiel du programme spatial comme l’a déclaré le 2 septembre le directeur du MBRSC, centre spatial émirien.
Mais ce programme spatial se déroule aussi au sol, et toujours dans une vision de coopération internationale.
Un nouveau partenaire américain
Un des composants du programme spatial des Émirats arabes unis a été la mise en place d’un écosystème technologique, le Hub 71, à Abu Dhabi, avec l’aide de la société d’investissement Mubadala. Il est destiné à recevoir, à l’horizon 2022, jusqu’à 100 entreprises, dédiées aux différents aspects de l’industrie spatiale. Il y a quelques jours, la société américaine Nanoracks annonçait l’ouverture de ses premiers bureaux et ateliers à Abu Dhabi.
Nanoracks est une jeune entreprise, mais néanmoins leader mondial dans la fourniture d’accès commercial « low cost » à l’expérimentation spatiale. Elle a eu l’idée de créer et développer de très petits racks de forme standardisée, cubes de 10cm de côté, afin de permettre à tout organisme de recherche de mener des expériences à bord de l’ISS. Cette idée a été accompagnée par la construction de nano-satellites, basés sur la dimension de ce même cube ou de ses multiples. Ils sont ensuite lancés automatiquement depuis l’SS à partir de «container ».
Nanaoracks contribuera au Concours « Tests in Orbit » destiné aux étudiants émiriens, matérialisant ainsi la volonté des EAU de dynamiser la recherche spatiale universitaire, en leur donnant accès aux expériences en orbite, et encourager sa jeunesse à rejoindre les filières de formations scientifiques. Donc, de nombreux nano satellites émiriens en perspective dans les prochaines années…
Mais les États-Unis ne seront pas les seuls partenaires
L’arrivée d’un partenaire européen
Depuis quelques années le groupe Airbus a créé une structure, Starbust, destinée à la fois à, accompagner la croissance des start-ups aérospatiales et, aider les grands groupes de ce secteur à trouver, auprès de ces start-ups, de nouvelles technologies ou applications, accélératrices de leur développement. Starbust est devenu leader mondial dans ce domaine.
Le Hub 71 a donc eu le plaisir d’annoncer, en même temps que l’arrivée de Nanoracks, l’implantation prochaine de Starbust au sein de son écosystème. Pleine synergie entre ces deux implantations, Nanoracks ayant ainsi à disposition toutes les ressources nécessaires pour mettre en œuvre son développement local, destiné à rayonner dans tout le Moyen-Orient et même vers l’Asie du sud-est.
Starbust sera à même d’offrir son savoir-faire dans le domaine de l’accompagnement financier, du conseil, ou la création de nouvelles opportunités commerciales, ainsi qu’à tous les partenaires de Hub 71.
Tous ces événements de coopération internationale sont la suite d’une longue tradition coopérative depuis le lancement des premiers satellites émiriens en 2000.
Un ADN coopératif
Depuis le premier satellite émirien, le maître-mot est coopération. Propriété de la société Thuraya, basée à Abu Dhabi, il fut construit sur une plate-forme technologique, américaine, Boeing, et lancé par une fusée Zenit 3SL, conçue et fabriquée sur le territoire ukrainien. L’ensemble s’élança vers l’orbite géostationnaire depuis la plate-forme off-shore de la société Sea Launch, depuis l’océan pacifique…. On saurait difficilement faire plus international et coopératif… !
La coopération s’est également établie avec la Corée du Sud pour la construction des satellites, et le Japon pour leurs lancements.
La dynamique s’est encore élargie quand l’agence spatiale émirienne, UAESA, United Arab Emirates Space Agency, créée en 2014 a signé son premier accord de coopération en 2015 avec la France et le CNES, Centre National d’Études Spatiales.
Le programme spatial émirien est ainsi centré depuis sa naissance sur une profonde coopération internationale.
L’opération en cours, du premier astronaute émirien, mis en orbite depuis la Russie, ne fait que poursuivre cette volonté et cette vision. L’an prochain, le rêve spatial et la réalité coopérative continueront avec l’envol, depuis le sol japonais, et la base de lancement de Tanegashima, non plus d’un satellite émirien autour de la terre, mais d’une sonde vers… Mars… !
Elle devrait en 2021, pour le 50e anniversaire de l’indépendance des Émirats, se mettre en orbite autour de la planète rouge, après s’être élancée du Pays du Soleil Levant…
Le programme de coopération spatiale émirien s’ouvre aussi à la poésie… !